Pleurs

Pleurs

20 janvier 2015 0 Par lechampenois

Pleurs du latin plaiodurum : la forteresse des marais.

Pleurs village hybride, histoire italienne, quand Rome rencontre Venise. Pas question bien sûr de Palais des Doges ou de fontaine de Trévi mais à Pleurs le passé permet bel et bien de franchir les frontières. Forteresse des marais, étrange paradoxe.

En règle générale, les marais n’ont besoin de personne pour se défendre, au contraire ils servent souvent de barrière naturelle, d’obstacle. Alors pourquoi dans ceux- là y avoir construit une citadelle ? Histoire de trésor ? Sans aucun doute, mais lequel ?

 

 

La bien nommée Superbe, la rivière ? Non ! Elle n’a d’intérêt pour personne. Au contraire ! Elle et ses multiples affluents en s’épanchant mollement n’ont jamais apporté que moustiques et pestilence. Un marécage n’est en soi pas un trésor, ni une bénédiction. Alors quel était le secret, le joyau de Pleurs la fortifiée ? Ni joyau, ni couronne, un carrefour. Le proverbe veut que tous les chemins mènent à Rome. Certes mais au moins 2 d’entre-eux, et non des moindres, passaient à Pleurs.

L’un direction l’île lointaine d’Angleterre et l’autre tranchant la campagne vers l’est, vers le monde barbare. Contraints par leur obsession de la ligne droite, les ingénieurs romains n’avaient d’autre choix que de les marier là : en plein marais. Pleurs, là où se croisent les routes, la Rome régionale devait donc sortir de terre armée pour tenir la position. Murailles, créneaux et murs épais, ne pouvant pas s’appuyer au sol trop meuble, on les a suspendus, du moins surélevés.

Pleurs, forteresse sur pilotis. Venise guerrière. Ou comment tenir un marais carrefour du monde barbare comme on tient une lagune, fenêtre sur l’orient. Protéger le monde latin, tel était son devoir, sa récompense : le commerce. Bien vite le passage aidant, nombreux sont ceux qui s’y installèrent. D’un château de bois, pleurs a grossi.

 

 

Le village est devenu une véritable cité flottante, uniquement ancrée au sol grâce à quelques pieux de bois. Mais les choses changent, avec le temps même Rome l’éternelle est tombée, les voies romaines oubliées. Pleurs, la stratégique, la Venise romaine, le verrou n’avait plus alors ses atours d’antan. Les chemins passeront désormais ailleurs. Au 19ème siècle, dernier coup de canif, on assèche : plus de marais.

Fin de l’histoire, liquidation de l’identité historique. Pleurs au bord de la superbe devenue sage, n’est plus au carrefour du monde mais il en est encore un beau petit coin.