1125-1151  Thibaut II – de Champagne le Grand

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Thibaut II de Champagne le Grand

(I° ) Comte de Champagne

 

Vers l’an 1 125, Thibaut réunit le comté de Champagne à ceux de Blois et de Brie par la vente ou la cession que lui en fit Hugues , comte de Champagne, son oncle.

On ne voit pas cependant qu’il ait jamais pris le titre de comte de Champagne.

L’an 1 155 , le roi Louis le Gros , irrité des liaisons de Thibaut avec le roi d’Angleterre, Henri I, son oncle, contraires au repos du royaume, entre dans le pays chartrain à main armée , brûle Bonneval , et envoie de là une partie de ses troupes raser Château-Renaud , autre place appartenant au comte.

La paix s’étant faite, peu de temps après, entre les deux monarques, Thibaut obtint d’y être compris. La même année, après la mort de Henri, tandis qu’Etienne , comte de Boulogne, s’empare du trône d’Angleterre , Thibaut, son frère aîné, va se rendre maître de la Normandie, à l’invitation des seigneurs du pays.

Mathilde , fille de Henri et femme de Geoffroi, comte d’Anjou, accourt pour lui disputer ce duché. Geoffroi la suit et fait plus de ravages que de conquêtes. Etienne étant venu , l’an 1 157, au carême, en Normandie , engage son frère à se retirer, moyennant une pension de deux mille marcs d’argent qu’il lui remet.

Thibaut, la même année, fut du voyage que Louis le jeune fit en Aquitaine pour épouser l’héritière de ce duché. L’an 1 141, après la bataille de Lincoln, où le roi Etienne perdit la liberté, les seigneurs normands , résolus de n’obéir ni à Mathilde ni à son épouse, députent à Thibaut l’archevêque de Rouen (Hugues d’Amiens) avec quelques-uns d’entre eux vers la mi-carême, pour lui offrir le duché de Normandie et le royaume d’Angleterre, comme s’ils eussent pu également disposer de l’un et de l’autre.

Thibaut renvoie leurs offres au comte d’Anjou  , qu’il engage par là à lui céder la ville de Tours, laquelle était , dit Ordéric Vital, de son fief. Thibaut, la même année , donne asile dans ses états à Pierre de la Châtre , nommé à l’archevêché · de Bourges par le pape Innocent, et banni par le roi Louis le Jeune. Ce procédé du comte pique au vif le monarque, déjà indisposé contre lui pour le refus qu’il avait fait tout récemment de le suivre dans son expédition contre le comte de Toulouse.

Thibaut, l’année suivante , achève d’irriter son souverain par le trait suivant. Raoul , comte de Vermandois , avait répudié sa femme Éléonore, parente du comte de Champagne, pour épouser Pétronille, sœur de la reine de France. Thibaut, voulant venger l’outrage fait à sa cousine , écrivit, de concert avec Saint-Bernard, au pape Innocent, pour l’engager à contraindre Raoul, | par les censures, de reprendre sa première femme. Raoul fut en conséquence excommunié dans un concile tenu , l’an 1 142, par le légat, Yves, et les évêques qui avaient autorisé son divorce, furent suspendus de leurs fonctions. Louis, déterminé à faire ressentir au comte de Champagne les effets de son indignation, va faire le siège de Vitry qu’il emporte d’assaut , et termine là son expédition.

Elle ne fut que trop funeste par la fureur des soldats, qui, ayant mis à son insu le feu à l’église , firent périr dans les flammes treize cents personnes qui s’y étaient réfugiées. Louis eut tant de regret de ce désastre, qu’il ne voulut pas pousser plus loin sa vengeance , et s’en revint après avoir fait présent de sa conquête à Eudes-Archambaut, fils de Guillaume de Sulli, frère de Thibaut. ( Robert du Mont. )

L’an 1 145, il fit hommage à Eudes II , duc de Bourgogne, à l’endroit dit le Ru d’Augustine, entre Mussi-l’Evêque et Châtillon-sur-Seine, pour le comté de Troyes et autres fiefs qui relevaient de ce duché , savoir, l’abbaye de Saint-Germain d’Auxerre , la châtellenie de Saint-Florentin , Bar-sur-Seine , la Ferté-Loupière, Chappes , Planci, Arcis-sur-Aube , Isles , Rameru et Joigni. ( Pérard , p. 227 , Mss. de Béthune , vol. coté 8467.)

La même année, il fait la paix avec le roi par la médiation de Saint-Bernard. Le père Mabillon remarque que tous les auteurs du temps de Thibaut font de grands éloges de ce comte : il a reçu en particulier de Saint-Bernard plusieurs lettres pleines de marques d’attachement et d’estime. Ce fut à la prière de ce Saint que Thibaut acheva le monastère de Clairvaux, commencé par le comte Hugues.

Les abbayes de Pontigni, de Preuilli, et autres , lui sont redevables de leur fondation. Cependant on ne peut excuser ce prince d’être entré dans presque toutes les ligues qui se formèrent en France contre le roi Louis le Gros. ll eût mieux fait d’être moins libéral envers les églises , et plus soumis envers son souverain.

Albéric, moine cistercien, l’accuse même d’avoir usurpé le bien d’autrui toutes les fois qu’il se trouvait à sa bienséance, et de l’avoir retenu sans scrupule. (Ad ann. 1 143.) Sa mémoire est particulièrement chère à la ville de Troyes, qui lui doit ses premiers établissements , ses manufactures et son commerce. Ce fut lui qui, pour la commodité des manufacturiers de cette ville, partagea la Seine en mille ramifications qui la portaient dans tous les ateliers : « entreprise, dit un illustre Troyen , digne de l’admiration » des siècles les plus éclairés, soit par son objet, soit qu’on la » considère du côté de l’art qui a présidé à cette savante distri» bution , dont nous jouissons encore aujourd’hui ». Thibaut mourut le 8-janvier 1 152 (N. S.) , et fut enterré à Lagni-surMarne. (Mabil. Pagi. )

De MAHAUT ou MATHILDE, son épouse , fille d’Engilbert II , duc de Carinthie, et marquis de Frioul , qu’il avait épousée en 1i26, il laissa quatre fils et six filles :

  1. Henri , comte de Champagne et de Brie
  2. Thibaut le Bon , comte de Blois et de Chartres
  3. Etienne, comte de Sancerre en Berri
  4. Guillaume, surnommé aux blanches mains, évêque de Chartres, puis archevêque de Sens , ensuite de Reims, et cardinal de Sainte-Sabine.

Le père Labbe ( Tableaux genéalogiques ) ajoute un cinquième fils, Hugues, qu’il fait, sans fondement, abbé de Cîteaux en 1 155.

Les filles de Thibaut sont :

  1. Agnès, femme de Renaud II, comte de Bar-le-Duc ;
  2. Marie, alliée à Eudes II , duc de Bourgogne
  3. Elisabeth, qui épousa, 1° Roger, duc de la Pouille, fils de Guillaume, roi de Sicile; 2° Guillaume Goeth , ou Gouet, quatrième du nom, seigneur de Montmirail et de quatre autres baronnies dans le Perche , qui formaient ce qu’on appelait le petit Perche, ou le Perche-Gouet;
  4. Mahaut, femme de Rotrou III , comte du Perche ;
  5. Marguerite, religieuse de Fontevrault ;
  6. Alix, ou Adèle, que Louis VII, dit le Jeune, épousa en troisièmes noces l’an 1 16o.

Mahaut, leur mère , se fit religieuse à Fontevrault après la mort de son époux. ( Camusat, Miscel. p. | 547.) Ce prince eut de plus un fils naturel nommé Hugues , ‘ moine de Tiron, puis, en 1 165, abbé de Lagui.

Thibaut le Grand fut, à proprement parler , le premier comte de Champagne, ses prédécesseurs n’ayant possédé dans cette province que le comté de Troyes.

 

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